25 mai 2014
Cinq minutes et l’éternité
Se lèvent en cinq minutes
Se douchent en cinq minutes
S’habillent en cinq minutes
Déjeunent en cinq minutes
Font la vaisselle en cinq minutes
Sont prêts en cinq minutes
Partent en cinq minutes
Sont opérationnels efficaces performants productifs en cinq minutes
Réagissent en cinq minutes
Ne restent aux toilettes que cinq minutes
Pigent en cinq minutes
Résolvent un problème en cinq minutes
S’adaptent en cinq minutes
S’activent en cinq minutes
Meurent
Sont oubliés en cinq minutes
Pas grave
Se sont oubliés eux-mêmes
Mais qu’ont-ils fait le reste du temps ?
(Extrait de Poèmes de Preben Mhorn) © Éditions Orage-Lagune-Express
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19 mai 2014
Poèmes de Preben Mhorn
(Recueillis et commentés par Christian Cottet-Emard)
Extrait :
Instructions
Il ne devrait pas y avoir grand monde le jour de mes obsèques
Au moins le cortège de mes vieux chagrins secrets
Esprits las mais présents dans les airs
Tel sera le vrai mystère non point ma mort si commune mais ces chagrins sévères et solennels comme des fantômes
Plus présents que mes amis qui ne seront peut-être pas là du reste car les amis font ce qu’ils veulent et ce qu’ils peuvent c’est pour cela qu’ils sont des amis
Plus résolus que mes ennemis qui n’existent d’ailleurs peut-être pas tant il est difficile d’avoir suffisamment de stature pour faire un véritable ennemi
J’essaierai de leur dire à tous amis peu présents et improbables ennemis
Pas de larmes ni pures ni de crocodile s’il vous plaît ne pleurez pas
Déjà que ce n’est pas drôle les vieux chagrins secrets qui survivent aux défunts et s’en vont de par le monde à la recherche d’un nouveau corps
© Éditions Orage-Lagune-Express, 2014
23:55 Publié dans Poèmes de Preben Mhorn | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : preben mhorn, poèmes, œuvre poétique, éditions orage-lagune-express, commentaire, christian cottet-emard, édition, publication, biographie de preben mhorn, enseigne de vaisseau mhorn, portrait de preben mhorn, carnet, droits réservés, édition établie, lisbonne, venise, estuaire du tage, saudade
29 avril 2014
Carnet / De la fuite
Vendredi, samedi et dimanche consacrés aux trois concerts du festival Chromatica. Lundi, concert privé chez l’un des musiciens, Olivier Leguay, qui nous interprète au piano des pièces du compositeur américain Morton Feldman, notamment Palais de Mari que j’ai découvert et bien apprécié. Il me semble cependant que je ne ressens pas cette musique de la manière qu’a peut-être prévu le compositeur. Je ne comprends la musique que par l’affect, jamais de manière intellectuelle, non pas parce que je m’interdis cette approche mais simplement parce que telle est ma nature.
La soirée s’est prolongée autour d’une bonne table entre amis et artistes qui ont participé aux concerts du week-end. Discussions amicales, drôles, chaleureuses sur la musique, la littérature, la peinture et la danse avec des bonnes blagues et des anecdotes dans l’atmosphère détendue et conviviale qui a permis de fuir quelques heures les soucis quotidiens et l’affreuse grisaille du printemps local.
Au lit, un rêve constitué d’une série de variations sur le thème de la femme et du papillon a visité mon bref sommeil. Sans doute parce que mon livre Le Grand variable (éditions Editinter, épuisé) a été rapidement évoqué dans la soirée et que pour la première édition, le collage de mon ami Bernard Deson incluant une femme et un papillon avait été retenu parmi d’autres pour un projet de couverture. Je crois aussi que je peux classer ce genre de rêve surréaliste dans la catégorie des rêves de fuite.
Changement d’ambiance mardi matin (à part le ciel toujours aussi bas et sombre). Je n’arrive pas à me concentrer pour écrire car je dois guetter l’arrivée de gens qui viennent retourner le jardin au motoculteur. Il s’agit de personnes qui travaillent dans le cadre d’une association de réinsertion sociale et professionnelle. Depuis mon bureau, j’entends ronfler le motoculteur. Au bout d’un moment, le bruit cesse et l’utilisateur du motoculteur vient me demander si je n’aurais pas un morceau de ferraille à lui fournir pour remédier par quelque bricolage improvisé à un problème technique. Je ne comprends rien à ce qu’il m’explique et je me retrouve à errer dans le garage à la recherche de ce fameux bout de ferraille dont je ne vois même pas à quoi il pourrait bien servir. Je déclare que je ne trouve rien, ce qui semble laisser l’homme perplexe. Je vois bien qu’il ne comprend pas que je ne comprenne pas. Exactement le genre de situation qui engendre en moi un profond malaise. Pendant quelques instants de silence qui me semblent une éternité, nous nous retrouvons les bras ballants à nous regarder comme deux extraterrestres. Pour une fois, le téléphone sonne au bon moment et me fournit le prétexte de la fuite.
Toute ma vie, j’aurai fui les mêmes choses.
13:01 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : carnet, concert, chromatica, morton feldman, musique, le grand variable, christian cottet-emard, éditions éditinter, éditions orage-lagune-express, bernard deson, blog littéraire de christian cottet-emard, femme-papillon, jardin, motoculteur, note, journal, prairie journal, palais de mari, piano